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Vivre avec passion
Qu'est-ce qui vous passionne ? Qu'est-ce qui vous concerne profondément ? Jean-Claude Legros 
Ecrivain, sculpteur, jardinier, alpiniste... Jean-Claude est un homme aux multiples passions qui l'ont fait beaucoup voyager. - Voyager en hauteur, car sa passion de l'escalade l'a conduit très haut. Attiré surtout par la beauté de l'ascension et le plaisir éprouvé en l'effectuant, ses pas l'ont conduit sur des sommets un peu partout dans le monde. - Voyager en largeur, comme jardinier, en travaillant les sols de nos régions. - Voyager en profondeur, en semant les mots de la poésie, du roman et du récit ou en sculptant le bois pour explorer l'imaginaire. Nous aurons le plaisir de l'accueillir et de récolter les graines qui seront semées lors de la rencontre. 27 novembre 2022 Reflets de la rencontre
Si Jean-Claude était… Si Jean-Claude était un enfant, il serait cet élève humilié lors de la remise des prix, alors qu’il obtenait plusieurs prix d’excellence, et que devant des centaines de parents, le directeur jésuite du collège lui envoyait cette sentence : fils de jardinier vous ne serez jamais qu’un jardinier… Si Jean-Claude était un ado, il serait cet apprenti grimpeur à qui le maître de stage montre les petites croix, rivetées aux rochers qui rappelaient aux vivants que d’autres étaient décédés tragiquement en pratiquant ce sport, très dangereux, disait-il. J’étais pour la première fois, confronté à la mort. Alors qu’à cet âge à peine pubère, j’avais déjà obtenu bon nombre de médailles dans des compétitions de gymnastique, de natation, de volley-ball, de football et, sans rire, de pétanque, mon corps aspirait à s’élever sur des parois rocheuses. D’emblée, j’ai eu peur de mourir en grimpant. Toujours, lorsque je m’encordais, un spasme stomacal me prenait. L’antinomie, c’est que je n’ai jamais eu peur d’avoir peur. Si Jean Claude était une montagne, il serait… le K2 et tout ce que les nouveaux grimpeurs, sponsorisés par de grandes marques y laissent comme déchets et détritus. D’ailleurs il a fait partie de l’équipe parcourant les pentes escarpées pour ramasser les crasses laissées par d’autres. Non, pas les traces, je dis bien les crasses, des tonnes de crasses… Si Jean-Claude était un sommet, il serait un sommet de Patagonie ou du Pakistan ou des Alpes… D’ailleurs, Jean-Claude est allé là haut des dizaines de fois, en solo, en équipes, avec des porteurs. Il a maints exploits dans son piolet. Il nous dit juste que oui, il était un bon grimpeur mais après quelques années de gloire, de conférences, d’interviews, d’articles commandés par les journaux ou écrits sur lui, il a aussi appris que l’ego n’était pas de bonne compagnie. Si Jean-Claude était un poète, il écrirait ceci : « Quelle montagne que ce Dru ! Plus que merveilleuse, elle m’apparut comme un chef d’œuvre de la nature. Sa proximité raviva cette envie de la gravir qui s’était effilochée comme peau de chagrin durant la montée dans cette neige molle. D’où venait ce poids étrange qui m’empêchait d’ouvrir la bouche, de hurler ma frayeur et ma joie, Le dernier soleil, au travers des légers nuages, m’obligeait à cligner des paupières alors que je voulais voir sans cesse, à éclater la rétine, cette ligne du Pilier Bonatti si verticale, si pure, si pleine d’histoires… D’ailleurs ce passage est de lui et vous le trouverez dans « Coup de cœur, coup de coke ». Si Jean-Claude était une sagesse, il serait celle qui accueille l’instant présent, celle du lâcher prise. Si Jean-Claude était un jardinier, il serait son grand-père, son père, son frère ou lui… mais aussi celui qui pratique la cueillette de ce qui l’attire dans toutes les cultures, philosophies ou religions, sans distinction. Si Jean-Claude était un humoriste, il serait lui-même quand il raconte les (gros) accrocs de santé, qu’il subit depuis quelques temps. Après les avoir escaladées sous toutes leurs formes et dans maints pays durant près de soixante ans, qui aurait pu imaginer que des montagnes se formeraient à l’intérieur de mon corps ?... Après avoir tenté de maîtriser la nature en créant et en entretenant des jardins, qui aurait pu imaginer que cette nature-là que j’aime, essayerait de me couper l’herbe sous le pied ? Si Jean-Claude est tout ce que je viens de citer, il est aussi cet homme qui se tient là devant nous, avec son humour grinçant, sa dérision, son amour des mots, ses exploits sportifs et ses silences, peut-être encore plus mystérieux qu’au début de la rencontre. Elle n’est pas encore née la cordée qui permettrait l’exploit d’arriver au sommet d’une montagne nommée Jean-Claude ! En fin de rencontre, le partage fraternel autour d’un verre et de biscuits a été vécu en évoquant celles et ceux avec qui nous cheminons dans la vie. Nous sommes heureux d’avoir vécu un moment fraternel avec Jean-Claude, "l’homme qui grimpe". Et Alain saisit ce terme pour faire mémoire de celui que Christian Bobin (décédé avant-hier) a nommé "l’homme qui marche", l’homme de Nazareth, toujours en chemin, jamais enfermé dans des chapelles et traçant une voie vers plus d’humanité. Jacqueline et Alain  Le K2, Chaine de l'Himalaya 8611 m
Le 15 juillet 1965, j’avais quinze ans depuis quinze jours. Mes parents, sur la base de l’adage Mens sana in corpore sano, m’avaient inscrit à un stage omnisport organisé par le mouvement de jeunesse "Viens avec nous".
On m’y initia aux affres du kayak, du ski nautique, de la plongée sous-marine, de la voile… et aux joies de l’escalade que l’on pratiquait sur un petit rocher d’une dizaine de mètres de haut. J’y pris tant de plaisir que l’on m’inscrivit à des sessions spécifiques sur les falaises de Freyr, les plus belles de Belgique. Je me demande toujours ce qui me motivait : trente-six dimanches durant, je me levais à 5h45 du matin. Je courais jusqu’à la gare de Verviers (3,5 kms). Changement de train à Liège et à Namur. Arrivé à Dinant, je devais prendre un autobus qui me déposait sur le plateau qui surplombait les rochers à 11h05 (5h20 pour faire 120 kms !) Hélas pour la suite de mon approche psychologique de l’escalade ou de l’alpinisme en général, le premier jour du premier stage, le moniteur fit parcourir aux adolescents qu’il avait sous son autorité le pied de toutes les parois de ce site, les nommant, les caractérisant. Ce faisant, il nous montrait les petites croix, rivetées aux rochers qui rappelaient aux vivants que d’autres étaient décédés tragiquement en pratiquant ce sport, très dangereux, disait-il. Monique, 1957 ; Jacques, 1959, etc. J’étais, pour la première fois, confronté à la mort. Alors qu’à cet âge à peine pubère, j’avais déjà obtenu bon nombre de médailles dans des compétitions de gymnastique, de natation, de volley-ball, de football et, sans rire, de pétanque, mon corps aspirait à s’élever sur des parois rocheuses. D’emblée, j’ai eu peur de mourir en grimpant. Toujours, lorsque je m’encordais, un spasme stomacal me prenait. L’antinomie, c’est que je n’ai jamais eu peur d’avoir peur. J’ai grimpé, je grimpe, je grimperai. Mal, très mal. Parce que j’ai peur de tomber (dans ce verbe, il y a "tombe"). Je sais qu’en escalade, je ne survis que grâce à ma volonté et à la force de mes bras, que j’ai acquise par ici et par ailleurs. Physiquement j’étais fort… et j’avais un gros cou et une très grosse voix. Le milieu de l’escalade m’a adopté, bien que mes performances soient assez médiocres (je faisais rire, j’amusais… et j’étais très fort à cette imbécillité de compétition -généralement organisée après moult bières- qu’est le bras de fer). On m’aimait bien. D’autant que parallèlement, j’écrivais. Les mots m’ont toujours fasciné. D’où viennent-ils ? Quels sont leurs sens ? J’adore triturer leur fange, tenter d’en trouver l’étymologie, me fondre en eux, jouer avec eux, les malaxer… et aussi les dire. Plus tard, et sans doute, grâce à tous les mots que j’ai pu écrire sur mes expéditions -sans faire mention de mes tares et de mes manquements, de mes angoisses et de mes doutes- je fus invité à participer au nettoyage du K2 par une expédition Mountain Wilderness, organisée par ce mouvement. Puis voilà, je suis ce que je suis. J’écris, je grimpe. Mon métier de jardinier me procurait ce dont j’avais besoin pour manger, boire, me chauffer, recevoir des amis, partager mon plaisir de vivre. Les mots me sont comme une peau que je caresse, tentant d’y trouver, dans tous leurs pores, les raisons de leur existence. Jean-Claude Legros (2011) 
"LA DALLE" à CHANXHE
86 mètres de hauteur Chaque vendredi, au retour du travail, avant le souper des enfants, je faisais un détour et m’installais sur l’un des blocs de rocher disséminés sur le terre-plein au pied de la "Dalle". Je la regardais, m’en imprégnais, devinais et imaginais d’autres itinéraires que ceux déjà existants. Ce rocher me fascinait. Je pouvais rester des heures assis, les genoux contre ma poitrine, mes bras les enserrant, figé devant cet écran sur lequel il ne se passait rien d’autre que ce que j’y projetais. Comme mû par une pulsion contre laquelle je ne pouvais ni ne voulais lutter, j’enlevais mes souliers de travail et enfilais mes chaussons d’escalade. Je savais que le premier toucher du rocher, quand la paume de la main hésite ou n’hésite pas, était celui qui décidait de tout. Un seul mouvement de doute et je m’en retournais vers mon quotidien. Un frisson de plaisir me parcourait-il que je ne tergiversais plus : je m’élevais, caressant, pelotant, promenant mes mains tandis que mes pieds épousaient en souplesse les moindres renflements. Etait-ce de l’escalade ou de la dance ? C’était de la tendresse. Je me sentais dans l’image, sur l’écran. Le monde : "la Dalle". Plus rien n’existait que mon corps allongé par des bras et ce roc qui me murmurait ce que murmurent les soirs, quand les frôlements, les sourires et les lèvres qui se touchent donnent à chaque seconde des airs d’éternité. Jean-Claude Legros, Histoires vraies, même en songes, Anecdotes vécues à Sprimont, Ed. Fond de la ville, p. 24-25 Le miroir vrai des gens
En expédition, les masques tombent. Chacun se donne tel qu’il est. J’aime les expéditions, même si parfois, elles font baisser l’estime que je porte aux personnes qui m’accompagnent. Elles sont le miroir vrai des gens qui s’y dévoilent, ne connaissant rien d’eux. Jean-Claude Legros, La montagne en mots choisis, Ed. Glénat, p. 65 Je ne me suis jamais soucié de l’altitude d’un sommet. Il est beau ? Il me fait envie ? Si j’ai les capacités physiques et mentales, j’y vais. Peu importent cette fierté et cet orgueil d’avoir atteint ce chiffre "huit mille". Ne me concernent que la beauté de l’ascension et le plaisir que j’ai éprouvé en l’effectuant. La course aux « huit mille » ressemble pour moi à un concours pour le Guinness book : combien de hamburgers peut-on avaler en moins d’une minute ? Jean-Claude Legros, La montagne en mots choisis, Ed. Glénat, p. 76 Altitude(s) L’étymologie du mot altitude nous ouvre en grand les portes de ce qu’il suggère. Il provient d’un verbe d’une langue ancienne, alere, qui signifie nourrir pour grandir. Il n’est pas étonnant de constater que le mot alimentation est issu lui aussi de la même racine car l’altitude est une nourriture tant pour le corps que pour l’esprit. Monter en altitude – en montagne s’entend, dépasser ainsi le point habituel de notre quotidien modifie notre équilibre, physique et psychique, altère – le plus souvent en bien – toutes nos assurances. Chaque partie de notre être – les sens, les muscles – se sent greffée d’étincelles. L’altitude offre l’harmonie entre la fiction et les rêves qu’elle sous-entend et les réalités de la beauté et du poids du monde. Marcher ou grimper vers un point plus haut, quelle qu’en soit la mesure, n’est-ce pas là une des réponses possibles à la recherche de nous-mêmes ? L’imaginer, c’est déjà en être convaincu. Quentin Iglésis et Jean-Claude Legros, Chamonix Mont-Blanc, JMEditions, p. 9. 
Je ne me suis pas battu
Le cancer était une montagne que j’avais à l’intérieur de moi. Seul, je ne pouvais en venir à bout, le mettre dans les liste des choses faites – un espoir qui se réalise. La différence entre la vraie montagne et celle-ci, c’est que je n’avais pas le choix : le risque que ma carcasse me lache était si grand que j’ai fait appel à des guides à haut potentiel, à celles et ceux qui possèdent les moyens de me permettre de continuer mon chemin. En toute confiance, sereinement, sans crainte aucune, je me suis abandonné. En ce sens, je n’adhère pas du tout à cette phrase, entendue mille fois : "Elle ou il s’est avec battu.e avec un courage exemplaire contre LA maladie", ni ne la fait mienne. Je ne me suis pas battu. Je n’ai pas eu cette force d’âme devant le danger, n’ayant eu vent de ce danger pour ma vie qu’après avoir entendu l’oncologue me répondre que, sans les soins apportés, il ne me serait resté qu’un, deux, voire trois ans à vivre avec beaucoup de souffrance. J’ai remis mon destin entre les mains de celles et ceux qui me les tendaient. Faites de moi ce qu’il vous semble bon afin que j’aie le privilège de vieillir encore un peu. Jean-Claude Legros, Diversion, Histoire d’une stomie, Ed. Fond de la ville, p. 54-55 Le plaisir de pouvoir s’arrêter
L’arrêt, l’immobilité retrouvée, la tension physique de l’effort soudainement relâchée, c’est une sensation merveilleuse, celle de l’arc débandé. Il vaut la peine de marcher, et de marcher dur, rien que pour le plaisir de pouvoir s’arrêter. Et la joie du départ n’est-elle pas faite déjà, largement, de celle de l’arrivée, savourée d’avance jusque dans les cruautés que l’absence implique ? Théodore Monod, Méharées, Actes Sud Plaisirs au ras de l'existence La marche permet aussi de redécouvrir un certain nombre de joies simples. On retrouve un plaisir de manger, boire, se reposer, dormir. Plaisirs au ras de l'existence : la jouissance de l'élémentaire. Tout cela, je crois, permet à chacun de reconquérir un certain niveau d'authenticité. Frédéric Gros Entretien dans Le Monde de 24 juin 2011 Marcher c’est revenir à la nudité des choses, revenir aussi à l’homme intérieur. Au cours d’une marche, les paysages entrent en nous, nous augmentent, nous dilatent et nous font prendre conscience que nous portons de grands espaces, qu’il y a en nous des arrière pays à parcourir en plongeant dans nos profondeurs. Pour dire ce besoin d’espace particulier, les chartreux emploient le beau terme de « spaciement ». C’est un besoin de l’âme que de prendre du champ, de retrouver des perspectives et de l’horizon. Charles Wright, Le Croix l’info, août 2022 |
Montagne froide
Oui ! J’ai choisi ma place dans ce fouillis de falaises. Aucune piste pour les hommes. Rien qu’un passage d’oiseaux. C’est pourtant là que je vis, depuis des années et des années. Des étés, des hivers ont passé, encore et encore ont passé. De loin parfois je vous crie : « pourquoi tout ce luxe, dites-moi, pourquoi ce vacarme » ? Dans ma montagne, il fait froid. Il fait toujours froid : escarpements déchiquetés recouverts de neige, forêts noires au fond des ravins qui crachent leur brouillard. Au seuil de l’été, l’herbe n’a pas fini de pousser. Au mois d’août, les feuilles tombent déjà. Bien que je sois sur les crêtes, curieux de tout, je ne devine pas encore le ciel. Nulle trace ne mène à Montagne Froide : les torrents convergent tant qu’il est difficile d’en retenir les méandres. Falaises insatiables, incroyablement accidentées. Mille sortes d’herbe, courbées par la rosée, pleurent. Elles pleurent un flanc de montagne, recouvert de pins, qui murmure le vent. J’ai perdu le sentier de ma cabane. Alors, j’interroge mon ombre : pourquoi ne me dis-tu pas : à partir d’où ? Quand il m’arrive de traverser la ville des engloutis, je vais au plus vite car elle dévore mon esprit, la ville. Je vais, soupirant sur ces restes anonymes, ces ossements que dédaigne la légende des immortels. Montagne Froide peut longtemps me garder : j’y ai trouvé un bon coin : vent léger dans un bois de pins, passage d’écoute. Je me sens bien. Voilà plus de dix ans que je ne suis retourné chez les miens. L’endroit par où je suis venu ? Je l’ai oublié. Il se peut que des voyageurs demandent la route de Montagne Froide. Montagne Froide n’est pas une voie tracée ! La glace en été ne fond pas. Chaque matin, les rayons du soleil se dissipent en volutes de brume. Comment suis-je parvenu jusqu’ici ? Je me le demande encore. Mon cœur est différent du vôtre. Mais si vous connaissiez Montagne Froide, vous y seriez frères. Avec moi. Escalader les flancs de Montagne Froide, c’est sans fin. Avec ses éboulis et ses éboulements, avec sa vallée profonde et ses herbages de brume, le gouffre vertigineux vous saisit. Même s’il n’a pas plu, les mousses sont glissantes. Même s’il n’y a pas de vent, les pins hurlent. Qui peut se dégager des chaînes du monde et venir s’installer avec moi sur ma natte de nuages ? Le vent cingle mon visage : coup de fouet. La neige fait sac, sur mon dos, tourne et tombe. Pareils toujours pareils, sans un rayon de soleil, les matins aux matins se succèdent. J’ai beau guetter de ci de là le signal du printemps : les années passent. Ca fait un bail que je suis à Montagne Froide. Libre, je dérive et j’observe. Mais aussi loin dans la montagne, aussi profondément, c’est rare. Pour un homme. Les nuages ondoient. L’herbe rase fait une bonne couche et le ciel bleu une bonne couverture. Je suis heureux : le paysage joue, pour moi, son répertoire. Durant les trente premières années de ma vie, j’ai couvert à pied des milliers et des milliers de rives ; j’ai traversé à gué bien des rivières, parcouru bien des prairies d’herbes vertes drues ; j’ai séjourné dans bien des villes, où sévissait la chicane ; j’ai essayé bien des potions magiques. Elles ne m’ont pas rendu invincible ; j’ai lu bien des livres. J’ai même écrit quelques poèmes. Aujourd’hui, me voici à Montagne Froide. Je m’endors contre la vallée, épurant ainsi mes oreilles. Dans la verte vallée, l’eau de printemps est claire. Au-dessus de Montagne Froide, la lune est blanche. L’esprit capte la lumière, de lui-même. De la saillie du silence naît le savoir. Contemple le vide : il est plus tranquille encore. Qui sait que je me suis dégagé du monde, du grand poussier de la poussière ? Montagne Froide est une demeure sans poutre ni mur. A gauche, à droite, devant, derrière, six portes grandes ouvertes. Le ciel sert d’entrée. Quant aux pièces qui la composent, elles sont toujours vides, enfumées. La grande muraille d’Est fait face à la grande muraille d’Ouest. Au centre ? Rien. Je ne suis jamais dérangé par les importuns. Quand j’ai trop froid, je prépare un petit feu. Quand j’ai faim, je fais bouillir quelques légumes. Impossible pour moi de m’habituer à la vie du travailleur avec ses grands pâturages et son étable, qui en impose. En vérité, il s’est construit une prison. Une fois à l’intérieur, pas moyen pour lui d’en sortir. Pensez-y sérieusement : ça pourrait très bien vous arriver. Si toute ma vie durant je suis à Montagne Froide, quoi de mal à cela ? Il faut suivre son chemin, jusqu’au bout ! Je regarde devant moi le monde s’agiter, heureux, trop heureux croyez-moi d’être assis là, au milieu des falaises. La plupart des gens ne connaissent pas Montagne Froide. Je veux dire qu’ils ignorent totalement son indécente utilité. Ils parlent d’elle comme d’un simple amas de pierrailles. Pourtant, une fois dans Montagne Froide, plus de problèmes, de nœuds dans la tête, de brume ou de brouillard. Combien d’automnes ai-je vu passer sur Montagne Froide ? Ma foi, je l’ignore. Seul, sans regret, je fredonne. Quand j’ai faim, je mâche un grain d’immortalité. Mon esprit alors prend appui sur la roche. Au bout du monde, Montagne Froide, ma maison. Lorsque les gens me considèrent, moi qui suis vêtu de hardes et de vieilles peaux, ils ne me prennent pas au sérieux. Au fou ! Pensent-ils. Ils ne comprennent rien à ce que je dis. C’est un fait : je ne parle pas le langage des gens : je les exhorte au passage. Vous pouvez vivre à Montagne Froide. Essayez un peu, pour voir. Qui vous en empêche, hein ? Han Shan, "Montagne froide" Rudra Eds 
L'homme qui marche
L"homme qui marche est ce fou qui pense que l'on peut goûter à une vie si abondante qu'elle avale même la mort. Ceux qui emboîtent son pas et croient que l'on peut demeurer éternellement à vif dans la clarté d'un mot d'amour, sans jamais perdre souffle, ceux-là, dans la mesure où ils entendent ce qu'ils disent, force est de les considérer comme fous. Ce qu'ils prétendent est irrecevable. Leur parole est démente et cependant que valent d'autres paroles, toutes les autres paroles échangées depuis la nuit des siècles ? Qu'est-ce que parler ? Qu'est-ce qu 'aimer ? Comment croire et comment ne pas croire ? Peut-être n'avons-nous jamais eu le choix qu'entre une parole folle et une parole vaine. Christian Bobin, L'homme qui marche, Ed. Le temps qu'il fait, p. 32-34. |
Nous sommes quelques personnes désireuses de créer ensemble un lieu où nos différentes conceptions du sens à donner à nos vies et à la vie en société sont mises en dialogue avec les évangiles, les événements du monde, nos lectures, nos rencontres… dans un climat d'écoute et d'échange.
Une forme de célébration qui nous ressource, une halte offerte 4 ou 5 fois au fil de l’année.
Nous nous adressons principalement aux jeunes adultes de 25 à 40 ans.
Pas de pré-requis (être croyant en Dieu…) sauf celui d’être curieux, ouvert, en quête... et convaincu que le partage et la confrontation dans le dialogue permettent de devenir plus autonomes et humains.
Alain HENRY de HASSONVILLE, Charles REUL, Franz HINDRYCKX,
Jacqueline CALEMBERT, Jean DEWANDRE, Joëlle ROIDEAUX, Pierre-Charles LIGOT
Une forme de célébration qui nous ressource, une halte offerte 4 ou 5 fois au fil de l’année.
Nous nous adressons principalement aux jeunes adultes de 25 à 40 ans.
Pas de pré-requis (être croyant en Dieu…) sauf celui d’être curieux, ouvert, en quête... et convaincu que le partage et la confrontation dans le dialogue permettent de devenir plus autonomes et humains.
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Jacqueline CALEMBERT, Jean DEWANDRE, Joëlle ROIDEAUX, Pierre-Charles LIGOT
Contacts :
Alain et Jacqueline HENRY de HASSONVILLE
04/344.48.81
[email protected]
Charles REUL
04/380.39.11
[email protected]
Joëlle ROIDEAUX
joelle.roideaux@hotmail.com
Franz HINDRYCKX
franz.hindryckx@skynet.be
Pierre-Charles LIGOT
[email protected]
Projet d’un lieu ouvert où se rencontrer pour partager nos recherches de sens.
Voir le document qui est à l'origine des "Dimanches du Houmier"
Alain et Jacqueline HENRY de HASSONVILLE
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Adresse du jour
Le Houmier Rue du Houmier 84 4140 Florzé 04/344.48.81 [email protected] Coordonnées GPS de la maison : 50.489783, 5.663939 |
